La Suisse et la crise de 1956 – solidarité, actions et paradoxes

Text: Tiphaine Robert

Dans la prière que ces trois Hongrois […] ont adressée au Seigneur, il y avait une phrase dont nous tous, leurs hôtes privilégiés, devrions nous inspirer : « Fasse que tous les Hongrois, et tous les réfugiés de partout, soient accueillis toujours comme nous l’avons été : simplement, sans curiosité, en leur donnant du travail, en frères ».

Paul Alexis, « Le Noël de Béla Magyar », La Liberté, 26 décembre 1956.

 

Introduction

1956. Un grand bouleversement politique et social s’amorce en Europe. La diffusion du rapport Khrouchtchev condamnant certains crimes de Staline met le feu aux poudres en Europe centrale, devenue satellite de L’URSS. En Pologne et en Hongrie, des milliers de personnes défilent pour l’indépendance de leur pays. Pendant que la situation dégénère en Hongrie, la crise de Suez accentue les tensions géopolitiques. Le monde entier craint l’éclatement d’une Troisième Guerre mondiale. Profitant de l’ouverture temporaire des frontières, environ 200000 Hongrois∙es fuient leur pays pour rejoindre le « Monde libre ».

La crise de 1956 bouleverse le quotidien de la paisible Suisse : on se rue dans les magasins pour faire des provisions, la guerre semble proche. L’intervention soviétique a choqué bon nombre de Suisses et Suissesses qui se rendent par milliers à des rassemblements de solidarité avec le « peuple hongrois ». La crise se répercute également sur la politique d’asile helvétique. En quelques mois, la Suisse accueille en effet quelque 13 000 réfugié·e·s sur les 200 000 personnes ayant quitté la Hongrie suite aux événements de l’automne. Proportionnellement à sa population, la Suisse est le pays au monde à avoir accueilli le plus de Hongrois·es[1]. Les historien∙ne∙s ont mis en évidence le consensus qui explique cet accueil généreux : convictions anticommunistes et haute conjoncture expliquent qu’on ait, en 1956, déroulé le tapis rouge devant les réfugié∙e∙s. À cela s’ajoute un enjeu d’image. Pour la Suisse, c’est une manière de redorer une tradition humanitaire, mise à mal par sa politique d’asile restrictive pratiquée durant la Seconde Guerre mondiale[2].

Dans un article publié en 1976, le philosophe Edgar Morin définissait la crise comme une succession d’étapes : perturbation ; accroissement du désordre et des incertitudes ; blocages ; déblocages. Parmi ces déblocages, Morin relevait l’accroissement de polémiques, révélatrices d’antagonismes profonds[3]. Le soulèvement de 1956 et sa répression font réagir partout dans le monde, s’indigner ou se figer dans une posture. Dans un contexte de tensions ravivées de la Guerre froide, ces événements ainsi que la question des réfugié·e·s se répercutent sur la politique intérieure de nombreux États.

« La crise a […] toujours un potentiel d’éveil »[4] dit Morin. Elle suscite recherches de solution, innovation et création. Jouant le rôle d’ « effecteur », elle mène à des choix, mais surtout à l’action. Le philosophe insiste à la fois sur l’évolution que la crise peut accélérer et sur le caractère chaotique de cette évolution, qui nait d’accidents, de perturbations, de désorganisation et d’organisation. La crise, considérée comme un microcosme de l’évolution des sociétés, représenterait à la fois un laboratoire pour étudier cette évolution[5]. Morin, en reprenant à la fois Marx et Freud, explique que la crise n’est donc pas seulement un effecteur mais aussi un révélateur :

[L]a crise révèle ce qui est caché, latent, virtuel au sein de la société (ou de l’individu) : les antagonismes fondamentaux, les ruptures, le cheminement occulte des nouvelles réalités ; et en même temps, la crise nous éclaire théoriquement sur la part immergée de l’organisation sociale, sur ses capacités de survie et de transformation.[6]

La communauté scientifique a déjà montré comment 1956 a exacerbé les tensions de la Guerre froide, devenues discrètes depuis la mort de Staline et le dégel[7]. Ce que révèle la crise des réfugié·e·s de 1956 a moins été étudié. Que dit-elle des sociétés du « Monde libre » ? Quelles évolutions ou changements accélère-t- elle ? Que montre le moment 1956 dans le cas suisse ? Pour répondre à ces questions, nous évoquerons les réactions que suscitent les événements de 1956 en Suisse, puis nous détaillerons les actions en faveur des réfugié·e·s ainsi que leurs dynamiques. Nous nous basons ici sur la description contemporaine de ces actions principalement par la presse, ponctuellement par les autorités ou par les réfugié·e·s[8]. Nous prendrons en compte deux échelles : celle des autorités, mais aussi celle de la société civile. L’objectif est de proposer une lecture politique de la réception de la crise de 1956 en Suisse à travers l’accueil des réfugié·e·s. Cette plongée dans 1956 est susceptible d’interroger notre rapport et nos réactions à la crise, qu’elle soit migratoire, sociétale, politique ou sanitaire[9].

 

Crise et utilisation politique de la crise

Pour comprendre l’exceptionnelle compassion des Suisses pour les réfugié∙e∙s à leur arrivée, il faut aborder les réactions helvétiques face aux événements de Budapest.

Dès le 23 octobre 1956, les médias suisses suivent le soulèvement avec intérêt. La presse – à l’exception des rares journaux d’obédience communiste – salue l’héroïsme de la jeunesse hongroise associée à un David s’opposant au « Goliath » soviétique. Condamnée le jour même par le Conseil fédéral, l’intervention soviétique du 4 novembre indigne toute la Suisse. Des cortèges se forment spontanément autour de slogans tels que « Pfui UDSSR »[10] ou « Le communisme tue des enfants, déporte les jeunes »[11]. Le 6 novembre, en saluant cette vague d’indignation, la NZZ clame à son lectorat que les Hongrois se battent « pour notre liberté aussi »[12]. En deux jours, les manifestations de soutien ont rassemblé plus de 100 000 personnes dans les seules villes de Berne, Zurich, Bâle, Lausanne, Genève[13]. Des violences sont observées, notamment à Genève où un bon millier de manifestant∙e∙s essaie de perturber la réception en l’honneur de l’anniversaire de la Révolution russe organisée par la délégation onusienne soviétique à l’Hôtel Beau-Rivage. Puis, un groupe se rabat sur les locaux de la Voix ouvrière – l’organe du Parti du Travail (PdT) – et l’assaille avec des pavés[14]. Ce type de violence n’est pas un cas isolé et partout, des membres du PdT sont stigmatisés ou rossés[15]. Autre conséquence : la ruée dans les magasins. Craignant une guerre prochaine ou une invasion russe, Suisses et Suissesses s’empressent de faire des réserves. Le Conseil fédéral se voit même contraint de dissuader la population d’avoir recours à de telles pratiques, également critiquées dans la presse : « Tous les milieux de la population sont invités à garder leur sang-froid et notamment à éviter par leur comportement tout mouvement de panique » demande-t-il[16]. Cette forme de crise mêlée à un engouement propre à 1956 mène à la suppression d’événements sportifs et culturels. Dans la presse, le ton est tragique : « Budapest est morte et ne réagit plus » ou « L’agonie de la Hongrie libre » titrent les quotidiens[17]. Du mouvement jeune radical suisse, aux étudiant∙e∙s de l’École des hautes études commerciales, en passant par les clubs d’automobile, les patient∙e∙s de sanatoriums et même les détenus d’un pénitencier, chaque témoignage de solidarité, souvent assorti d’un don, est rapporté dans la presse[18].

Il résulte de ce consensus une nouvelle unité au-delà des clivages politiques habituels dont il faut profiter. Certaines organisations anticommunistes prévoient ainsi des actions de protestation spectaculaires et alimentent délibérément les hostilités, comme le groupe Aktion Niemals vergessen qui distribue en décembre 1956 15 000 cocktails Molotov avec mode d’emploi dans les rues de Berne[19]. L’apogée de la solidarité a lieu le 20 novembre à 11h25. Après la sonnerie simultanée des cloches des églises, trois minutes de silence sont observées dans toute la Suisse, par une bonne partie de la population :

Un silence profond s’étendit sur la ville lorsque les trains, les tramways, les véhicules et les piétons s’arrêtèrent. Dans un calme impressionnant, un hommage fut rendu au peuple hongrois victime de la barbarie soviétique. Le travail a partout été interrompu, les administrations ont fermé portes et guichets, les téléphonistes ont débranché leurs appareils. Des temples et des églises ont ouvert leurs portes aux fidèles venus se recueillir. […] Bien des larmes coulèrent sur des visages graves.[20]

Les réactions observées en Suisse à la suite de l’intervention soviétique ne se distinguent pas fondamentalement du reste du « Monde libre ». Des États-Unis à l’Argentine, en passant par Berlin-Ouest, on ne compte pas les marches, actions humanitaires ou symboliques « pour la Hongrie ». Ces manifestations sont complétées par des assauts contre les ambassades soviétiques : des cailloux au Danemark aux déchets et légumes pourris à Reykjavik[21]. Des attaques sont aussi partout dirigées contre ceux qu’on considère comme la 5ème colonne de l’URSS : les partis communistes locaux.

En Suisse, les sociaux-démocrates s’emploient alors à se distancier du PdT en protestant avec véhémence contre l’intervention russe puis en s’engageant aux côtés du camps bourgeois dans l’accueil des réfugié∙e∙s[22]. D’autant que dans le cas de la Suisse, les mouvements de solidarité se dirigent aussi contre des cercles de gauche plus larges ou contre ceux qu’on soupçonne de sympathiser avec le communisme, intellectuel∙le∙s marxistes, syndicalistes, commerçant∙e∙s travaillant avec le PdT ou libraires vendant des livres de RDA[23]. Cette récupération de la crise hongroise envers tout ce qui ressemble de près ou de loin à du communisme n’est pas une exception mais elle nous semble plus efficace qu’ailleurs : fortement ostracisé, le PdT ne se remettra jamais tout à fait de 1956. À notre connaissance, certaines actions d’envergure comme les minutes de silence observées au niveau national représentent une exception mondiale. Dans le cas suisse, 1956 donne un coup de fouet à la Défense nationale spirituelle, cette doctrine qui prend un tour toujours plus anticommuniste au cours des années 1950[24]. Très implanté dans la société, l’anticommunisme explique en grande partie l’implication extraordinaire constatée au niveau de la société civile.

Début novembre, on apprend que toujours plus de Hongrois∙es parviennent en Autriche. Des voix s’élèvent déjà pour en accueillir. Au niveau gouvernemental, l’accueil des fugitif∙ve∙s représente un geste politique : la Suisse aura alors l’occasion de se distinguer sur la scène internationale en se montrant proactive dans la gestion de la crise des réfugié·e·s.

 

Un accueil fervent

Aux côtés de la Belgique, de la France, des Pays-Bas et de la Suède, la Suisse fait partie des premiers pays à répondre à l’appel du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et annoncer sa volonté d’accueillir des réfugié∙e∙s[25]. Les réfugié∙e∙s – ce n’est pas le cas dans tous les pays – ne doivent pas candidater pour obtenir l’asile en terres helvétiques. Il leur suffisait, pour être englobés dans le contingent, de désirer venir en Suisse »[26]. Le 13 novembre, alors qu’environ 27 000 fugitif∙ve∙s se trouvent en Autriche, le Conseil fédéral décide d’accueillir 4 000 personnes, puis, quelques jours plus tard, 6 000 personnes en plus[27].

Du côté de la société civile, la mobilisation est énorme. Elle a commencé avant l’arrivée des réfugié∙e∙s, dans l’aide à destination de la Hongrie. Avant même que le numéro du compte de l’aide à la Hongrie ne soit communiqué par la Croix-Rouge suisse, des centaines de personnes amènent spontanément des biens ou de l’argent dans ses locaux, ils sont en outre 10 000 volontaires à donner leur sang dans des centres de transfusion. Les actions caritatives rivalisent d’originalité : récolte de 108 tonnes de pommes de terre par les paysan·ne·s zurichois·es, « journée du kilo hongrois » en Gruyère, collecte de 600 000 plaques de chocolat par les écolier∙e∙s dans quelque 20 000 classes, tricot et vente de couvertures par des clubs de femmes, pendant que des politiciens renoncent à leurs jetons et que des employé∙e∙s décident, en groupe, de donner une partie de leur salaire au profit de l’aide à la Hongrie[28].

Au moment de l’arrivée des réfugié∙e∙s, un leitmotiv apparait alors dans la presse : le « peuple suisse privilégié »[29] doit se mobiliser, car « toute souffrance non endurée est une dette envers ceux qui l’endurent »[30]. La presse en appelle à une sorte de transfert de sympathie du « combattant de la liberté » au réfugié magyar : « la Suisse a ici la possibilité de montrer que la vague de sympathie et de respect pleine de vénération devant l’héroïsme de ce peuple qui a fendu tous les cœurs dans notre pays […] va laisser place à des actes concrets »[31].

Dès l’annonce de l’arrivée des premiers convois, beaucoup d’Helvètes se déplacent et accueillent les réfugié∙e∙s dans les gares, souvent de manière triomphale ou en leur donnant des cadeaux comme du chocolat ou des fruits exotiques : autant de symboles de la bonne marche de l’économie, en opposition à celle des régimes communistes où on ne trouve que rarement du vrai cacao et des bananes. Dans la presse, on ne se préoccupe pas du fait que ce premier groupe vient majoritairement de l’ouest de la Hongrie et que beaucoup n’ont pas participé aux combats, les réfugié∙e∙s sont assimilés aux combattants, admirés et attendus. Les locaux de la Croix-Rouge sont souvent trop petits pour réceptionner des tonnes d’habits et de denrées[32]. Deux exemples parmi des centaines montrent autant l’ampleur de la mobilisation que l’intérêt de la presse à rapporter en détail cette générosité :

Une grande foule de sympathisants attendaient jeudi soir sur la Place de la gare l’arrivée des nouveaux réfugiés hongrois. […] Bien que tous très fatigués, ils laissaient paraitre sur leur visage pâle la joie d’être dans notre pays. Les éclaireuses qui avaient fait la collecte à leur intention la veille en ville, leur distribuèrent force cadeaux.[33]

Les élèves du gymnase ont apporté du papier, des stylos, des calendriers, des jeux de cartes, des disques, une radio. […] L’école professionnelle a fait parvenir […] des lots de laine, de coton, d’aiguilles, tout ce qui est nécessaire à une femme pour la couture. […] chacun a fait son devoir, donné ce qu’il pouvait.[34]

Les entreprises ne sont pas en reste. Certaines proposent de parrainer des familles, comme la Brasserie Cardinal. D’autres annoncent des dons généreux, comme la chaîne de magasins PKZ qui offre des habits à une hauteur de 10 000 francs[35]. La société civile contribue largement à l’installation des réfugié∙e∙s. Villes et communes diffusent des appels dans le but de trouver des logements aux réfugié∙e∙s. Propriétaires d’hôtel, institutions, clubs ou particuliers proposent de mettre à disposition des chambres, résidences secondaires ou locaux de villégiature. Les lettres d’offres conservées dans des archives cantonales témoignent du crédit extrêmement positif des réfugié∙e∙s mélangé à une certaine culpabilité. D’aucuns leur proposent un toit « dans le but essentiel de redonner un peu de vie […] et de bonheur à ces cœurs meurtris »[36], ou encore : « profondément émus par la détresse de nos frères malheureux, nous avons décidé mon mari et moi de partager notre vie trop confortable »[37].

Dans les pages de tous les journaux de Suisse dès la fin de l’année 1956 fleurissent les petits encarts annonçant que telle ou telle commune « se propose d’accueillir une famille entière et de l’entretenir »[38] – souvent en imitant la municipalité voisine – et collecte les fonds nécessaires à « l’entretien de ces malheureux »[39].

Pendant cette phase d’hyperactivité humanitaire, les vieilles craintes liées à la présence étrangère, l’arrivée de réfugié·e·s et à l’Überfremdung sont mises entre parenthèses, car on ne considère pas les Hongrois∙es comme des étranger∙e∙s comme les autres. C’est ce qu’ont exprimés les témoins rencontrés dans le cadre de notre recherche décrivant leur arrivée en Suisse :

On était dans le train, on n’avait pas le droit de descendre mais on pouvait ouvrir les fenêtres… il fallait voir, je peux pas oublier ! La Suisse ! Les gens, ils nous attendaient ! Ils nous ont donné des fruits et tout ce qu’ils pouvaient : le thé, le café […] Les gens… on aurait dit qu’ils étaient heureux qu’on soit là ![40]

Un autre de nos témoins se remémore : « nous étions très populaires. Des jeunes filles s’intéressaient à nous sans qu’on ne fasse rien ! »[41]. La Feuille d’avis de Lausanne encourage son lectorat à convier à sa table « des victimes du martyre » :

Il est […] préférable de leur offrir ce qu’ils aiment. Si vous trouvez dans votre livre de cuisine une des innombrables recettes de goulache, cela prend du temps, mais cela n’est pas difficile à faire. […] Un repas pris à une table privée leur fera autant de bien à l’âme qu’au physique. Soignez donc le couvert, fleurissez la table et pour le dessert offrez des fruits, particulièrement des fruits exotiques introuvables en Hongrie depuis de longues années. […] Ne leur posez pas trop de questions, sauf peut-être sur leur famille s’ils ont envie d’en parler et préparez des cigarettes en abondance. Ils fument presque tous comme tous les gens qui ont eu faim.[42]

Il arrive même que des propriétaires de magasins leur propose de se servir de ce dont ils avaient besoin, gratuitement. D’autres sont allés au restaurant et au cinéma à l’œil[43].

Dans les casernes accueillant les réfugié·e·s, on allie discipline et bienveillance :

Les directives générales données dès le début par le service territorial au sujet du traitement des réfugiés indiquaient que ceux-ci devaient être considérés comme des « hôtes », qu’une discipline indispensable était exigée mais qu’elle devait être bienveillante et compréhensive et que tous les moyens étaient à mettre en action pour éviter l’oisiveté et le laisser-aller dans les camps[44].

Les équipes de camps agencent les lieux avec zèle :

On s’était ingénié à transformer les locaux en homes agréables. Pour les familles, des chambres séparées ou des dortoirs comportant des cloisonnements, pour les enfants des nurseries, salles d’école, salles de lecture, radio, fleurs etc. donnèrent un cachet spécial à nos austères casernes.[45]

Fin février 1957, tous les camps ferment leurs portes et la plupart des Hongrois·es s’installent en Suisse[46]. Sur les 13 803 arrivées enregistrées entre 1956 et 1957, quelque 1700 personnes choisissent de rentrer en Hongrie et 1638 personnes quittent la Suisse pour un autre pays occidental jusqu’en 1962[47]. Les documents qui évoquent l’accueil des réfugié·e·s témoignent d’un souci de leur bien-être qui n’a pas son pareil dans l’histoire suisse. Mieux, on fait tout pour que les réfugié·e·s restent en Suisse.

 

Les paradoxes de la générosité

Dès le début 1957, des hiatus étaient néanmoins progressivement apparus. La presse et les autorités évoquaient la « mentalité différente » des Hongroises et des Hongrois : « impatients », « fiers », « volubiles », « dépensiers », sont des termes récurrents pour les qualifier. Selon un discours très présent dans la presse, certains réflexes des arrivant·e·s seraient dus à leur expérience prolongée du communisme. Le moindre « incident » (bagarre, vol, etc.) est expliqué par l’endoctrinement « révolutionnaire » et les souffrances qu’ils auraient subies. Face aux rumeurs et aux difficultés de cohabitation, la presse et les autorités exhortent néanmoins la population suisse à la patience et à la tolérance envers les Hongrois·es. De concert, elles s’échinent à sauvegarder la bonne réputation des réfugié·e·s[48].

En réalité, les fonctionnaires des polices cantonales chargés de leur placement constataient avec déception que beaucoup refusaient ou quittaient la place de travail qu’on leur proposait.

Ce phénomène est en partie lié à un malentendu entrainant une polémique en Suisse comme dans d’autres pays d’Europe : nombre de réfugié∙e∙s ont rejoint la Suisse dans l’espoir d’émigrer outre-mer. Face à ce désir, les autorités préconisent une intégration accélérée en Suisse ! Elles répartissent rapidement les réfugié∙e∙s dans tout le pays. Elles invoquent leur bien-être mais les autorités craignent en fait surtout des mouvements de mécontentement au sein des réfugié∙e∙s et l’impact négatif qu’auraient de tels remous dans l’opinion publique[49].

Si chaleureux et spontané qu’il soit, cet accueil n’est pas sans compter un certain nombre de paradoxes. Les réfugié∙e∙s hongrois∙es font face à l’attitude et au regard des autochtones : générosité, mais aussi paternalisme, intérêt pragmatique, misérabilisme ou encore méfiance.

Comme nous l’avons vu, les appels lancés dans la presse pour obtenir des offres de logement ont comme résultat l’arrivée de nombreuses lettres. Ces écrits donnent des indications précieuses sur les attentes des Suisses. En Valais, par exemple, des lettres révèlent un mélange de charité et d’intérêts pragmatiques. Dans toute la Suisse, on cherche à accueillir des personnes à mi-chemin entre bonne à tout faire et membre de la famille. Ainsi, un homme âgé écrit : « comme vœux de Noël, nous désirons accueillir une famille hongroise à titre définitif comme membre de la famille ». Un peu plus loin, il précise : « [son] épouse est un peu infirme des jambes et elle a de la peine à faire tout le travail à la maison. […] Impossible de trouver des jeunes filles ou grands enfants suisses alors on prend du personnel étranger, c’est la seule solution »[50]. Mais des hommes sont aussi demandés : « envoyez-moi donc tout de suite un bon paysan de là-bas avec un enfant. Nous n’avons pas d’homme à la maison à part mon mari qui a 81 ans, ils seront bien traités »[51].

Nombre de commentaires relaient une forme émotionnelle et misérabiliste d’anticommunisme : « une vieille femme fixe un bouquet posé sur une table. Depuis combien de temps n’a-t-elle pas eu l’occasion de regarder une fleur ? » ou encore « [à Zurich] nous avons vu les enfants de Hongrie recevoir la première poupée, le premier jouet de leur vie »[52]. Des études sur le cas hongrois ou d’autres réfugié∙e∙s de la Guerre froide montrent le sentiment partagé par ces réfugié∙e∙s d’être en permanence considéré∙e∙s, dans une vision réductrice, comme « pauvres victimes du communisme » sauvées par la Suisse[53]. Sentiment qu’évoque l’écrivaine slovaque Irena Brežná, réfugiée en Suisse en 1968, avec un humour féroce :

Une femme maigre nous conduisit à travers de longs couloirs. Son regard plein de pitié glissa sur moi. Je me retournai pour chercher la malheureuse à qui il s’adressait, mais le monde était vide. Cette femme, qui n’était ni fardée ni crêpée, avait pitié de moi ! Je tâtai mon corps, il était encore entier. Je sentis tout à coup mon âme boiter sur le chemin qui mène à la couche de réfugiée.[54]

Autre paradoxe : les actes de charité ont souvent un caractère ostentatoire. Annoncés dans la presse, ils s’apparentent ainsi à autant de vitrines destinées à donner une bonne image de leurs émetteurs. En outre, les Suisses participent ainsi, consciemment ou non, à une sorte de démonstration de leur bien-être[55]. Le luxe, les vitrines alléchantes pleines de richesses, les réfugié·e·s ne pourront d’ailleurs pas y accéder par leurs propres moyens pendant de longues années et se retrouvent ainsi dans une sorte d’antichambre de l’abondance.

Cet étalage de richesses contribue à établir un rapport asymétrique dans lequel les réfugié∙e∙s s’apparentent à des enfants. Ainsi, dans les centres de la Croix-Rouge, comme à Lausanne, les « dames […] renseignent, conseillent, grondent parfois ». Du travail bien fait à l’usage du dentifrice en passant par la valeur de l’argent, « ils ont tout à apprendre ». C’est, en substance, le message délivré par des articles évoquant « l’appui moral » dispensé aux réfugié∙e∙s[56].

Les mots de Bálint Basilides, réfugié à l’âge de 12 ans à Neuchâtel, résume à notre sens les paradoxes que nous venons de décrire :

Nous avons vécu des années très difficiles. L’effort d’adaptation n’était pas aussi simple qu’on le croit. D’ailleurs dans les dix ans qui ont suivi notre arrivée en Suisse, la mère de deux autres jeunes Hongrois et ma mère se sont suicidées. Si on lit Hier, le roman d’Agota Kristof, on se rend compte que la situation n’était pas idéale. […] D’un côté, nous étions très heureux de la réception qui nous avait été faite, les gens étaient très aimables ; d’un autre côté, il y avait les défis de cette vie future qui se précisait, la crainte de savoir si on serait à la hauteur.[57]

À la lecture d’une coupure de journal gardée précieusement, car elle contenait un petit portrait de sa famille, l’ancien réfugié tique sur l’expression « nos protégés ». Elle témoigne, selon lui, de l’ambigüité de cet accueil et d’une « espèce de paternalisme malsain »[58].

 

Conclusion

Malgré ces quelques décalages, à la lecture des sources, une impression globale demeure : si la Hongrie s’était totalement vidée, il semble que l’on aurait trouvé, tôt ou tard, des solutions d’accueil et d’intégration pour neuf millions de personnes dans le monde occidental tant l’empathie pour les « combattants de la liberté » était grande. En Europe et en Suisse tout particulièrement, la crise de 1956 entraîne indignation puis mobilisation : les autorités politiques et la société civile s’activent pour trouver des solutions en faveur des déplacé·e·s. Cette mobilisation sans précédent nous inspire trois constats.

Premièrement, nous voyons dans ces actions la créativité conséquente aux crises qu’évoquait Morin. Selon nous, l’innovation réside ici dans le désir d’intégrer durablement les réfugié·e·s dans la société suisse. Les actions concrètes menées par les autorités et la population s’apparentent à des politiques d’intégration avant l’heure : parrainage, accompagnement personnalisé, mais aussi cours de langue et publication de journaux dans la langue des réfugié·e·s. Ces politiques d’intégration représentent une véritable ligne politique, à mille lieues de ce que vivent à la même époque les autres travailleurs et travailleuses étranger∙e∙s et de ce qu’ont expérimenté les réfugié·e·s transitant par la Suisse avant 1956. Dans le cas des travailleurs et travailleuses étranger·e·s, les autorités préconisent même leur non-intégration et font en sorte qu’ils et elles ne s’établissent pas. En témoigne par exemple l’interdiction aux saisonniers de séjourner en Suisse avec leur famille[59]. L’« opération intégration » de 1956 ne trouve quasiment aucun détracteur à l’aube des années Schwarzenbach[60], tout cela dans un consensus pro-réfugiés qui peut étonner aujourd’hui.

Deuxièmement, la résolution de la crise des réfugié·e·s met en évidence, comme l’évoquait Morin, certes des solidarités mais aussi de profondes ambiguïtés. L’aide intéressée fait partie de ces ambigüités. D’abord lorsque les actions de solidarité sont utilisées comme des vitrines de générosité. En 1956, de nombreux pays du « Monde libre » manifestent leur volonté d’accueillir des réfugié·e·s fuyant la Hongrie. Ces réfugié·e·s représentant l’échec du régime, leur image est exploitée politiquement pour renforcer le sentiment anticommuniste dans la population. Nous pouvons l’observer peut-être plus qu’ailleurs en Suisse, où l’anticommunisme s’apparente à une idéologie d’État. Le paternalisme envers les réfugié·e·s va de pair avec des exigences précises face aux arrivant·e·s, qui ne montrent pas toujours la reconnaissance éternelle que l’on attend d’eux.

Toutefois, nous percevons dans toutes ces actions, une compassion sincère parmi la population qui se traduit par une grande volonté de participer à l’accueil. Un élan de générosité qui trouve son origine dans la crise de 1956 elle-même. La crise met en marche, comme l’explique Morin, « ne serait-ce qu’un moment, […] tout ce qui peut apporter changement, transformation, évolution »[61]. Nous voyons la crise de 1956 comme un accélérateur de solidarités, ici conditionnés par la Guerre froide. Les historien·ne·s ont montré que les réfugié·e·s fuyant les régimes communistes sont de parfaits client·e·s pour les autorités suisses et que 1956 inaugure une phase de la politique d’asile suisse qui se voulait libérale. En offrant aux réfugié·e·s un accueil durable, la Suisse rompt ainsi totalement avec la pratique de l’accueil provisoire, jusque-là de mise. Outre les préoccupations humanitaires, il s’agit ainsi de rattraper la politique d’asile extrêmement restrictive pratiquée lors de la Deuxième Guerre mondiale. Dans la population, la mobilisation est exceptionnelle. Si tout le monde ne remet pas en question l’attitude de la Suisse face aux réfugié∙e∙s israélites, la population a bien conscience de sa chance d’avoir été épargnée par le conflit mondial. L’élan de compassion en 1956 et la solidarité qui l’a suivi nous semble donc participer à un processus de déculpabilisation au sein de la société suisse en même temps qu’elle active une empathie à grande échelle. Dans l’accueil, les sources en témoignent, on ne se contente pas d’aider ou d’offrir de l’argent, les responsables de l’accueil et les aidants prennent en compte les difficultés liées au passé des réfugié·e·s, à leur situation, voire à leur futur : traumatismes, mal du pays, isolement, déracinement, manque de la famille, etc.

La crise peut dans ce contexte faire émerger de nouvelles solidarités envers des minorités ou des groupes vulnérables – dans notre cas envers des migrant·e·s. Des solidarités toutefois souvent limitées dans le temps et sélectives.

 

Tiphaine Robert a effectué ses études à l’Université de Fribourg. Ses travaux portent sur l’histoire des migrations pendant la Guerre Froide et sur l’histoire de l’art commémoratif. Assistante diplômée en histoire contemporaine à l’Université de Fribourg, Sa thèse de doctorat portant sur les réfugié-e-s hongrois-es de 1956 sera publiée prochainement.

 

[1] Lasky, Melvin et Bondy, François, La révolution hongroise, Paris, Plon, 1957, p. 321.
[2] Robert Tiphaine, « Die Ungarnflüchtlinge von 1956 in der Schweiz : Konstruktion eines Mythos und was wir heute daraus lernen können/« Les réfugié-e-s hongrois-es de 1956 en Suisse : construction d’un mythe et leçon pour aujourd’hui », Fakten statt Mythen, n° 113 / 7 décembre 2017. En ligne :  https://www.fluechtlingshilfe.ch/fakten-statt-mythen/beitraege-2017/die-ungarnfluechtlinge-von-1956-in-der-schweiz-konstruktion-eines-mythos-und-was-wir-heute-daraus-lernen-koennen.html (08.05.2020).
[3] Morin, Edgar, « Pour une crisologie », Communications 25 (1), 1976, pp. 149‑163. En ligne: <https://doi.org/10.3406/comm.1976.1388>, pp. 155-158.
[4]  Ibid., p. 159.
[5]  Ibid., pp. 159-162.
[6] Ibid., p. 163.
[7] Pour une vision synthétique et récente, on se rapportera par exemple à Hall, Simon, 1956 : Welt im Aufstand (traduction : Held, Susanne), Stuttgart, Klett-Cotta, 2016 [1956, The World in Revolt, 2016].
[8] Nous avons dépouillé systématiquement les journaux suivants (entre 1956 et 1958) : La Liberté, la Feuille d’Avis de Neuchâtel, L’Impartial, Neue Zürcher Zeitung, Die Tat, Ostschweiz, le Journal de Genève, La Suisse, la Feuille d’avis de Lausanne, L’Illustré, Voix ouvrière, Vorwärts. Nous avons eu également recours à certaines archives étatiques, ainsi que des extraits d’entretiens avec d’ancien·ne·s réfugié·e·s menés de 2015 à 2019.
[9] Cet article est tiré de notre thèse de doctorat qui sera prochainement publiée : Robert, Tiphaine, Des migrant·e·s et des revenant·e·s. Une histoire des réfugié·e·s hongrois·es en Suisse (1956-1963), thèse de doctorat, Université de Fribourg (Suisse).
[10] Photographie d’une manifestation devant l’ambassade soviétique à Berne, Zurich, Archives sociales, F 5032-Fc-0042. En ligne : https://www.bild-video-ton.ch/bestand/objekt/Sozarch_F_5032-Fc-0042 (25.01.2019).
[11] Photographie d’une manifestation à Zurich, in : Duvanel, Laurent et Levy, René, Politique en rase-mottes : mouvements et contestation suisses : 1945-1978, Lausanne, Réalités sociales, 1984, p. 85.
[12] « Zürich und der ungarische Freiheitskampf », Neue Zürcher Zeitung, 6 novembre 1956.
[13] Pour plus de détails : Räber, Louis, Der ungarische Aufstand von 1956 : Aufstand und Auswirkungen in der Schweiz [Mémoire de licence en histoire], Zurich, 1983.
[14] Ibid., p. 51 ; « Près de soixante mille Genevois ont rendu hommage à la Hongrie », Feuille d’avis de Lausanne, 8 novembre 1956.
[15] Lanz, Rita, Flüchtlingshilfe zwischen Vergangenheitsbewältigung und nationaler Selbstdarstellung : die Schweiz und die Aufnahme ungarischer Flüchtlinge 1956 [Mémoire de licence en histoire], Zurich, 1996.
[16] « La psychose du sac de sucre et de l’estagnon d’huile », Feuille d’avis de Neuchâtel, 10 novembre 1956.
[17] Feuille d’avis de Lausanne, 5 novembre 1956 et Feuille d’avis de Neuchâtel, 12 novembre 1956.
[18] Ces exemples sont tirés de la Feuille d’avis de Neuchâtel, 10, 12 et 17 novembre 1956.
[19] Tréfás, David Die Illusion, dass man sich kennt : schweizerisch-ungarische Beziehungen zwischen 1945 und 1956, Zurich, Chronos, 2008, p. 216.
[20] « La Suisse a fait silence pendant 3 minutes », Feuille d’avis de Neuchâtel, 21 novembre 1956.
[21] Hall, 1956 : Welt im Aufstand, op. cit., p. 328 ; Victor Sebestyen, Budapest 56 : les 12 jours qui ébranlèrent l’empire soviétique, Paris : Calmann-Lévy, 2006, pp. 309-400.
[22] Le PS s’emploie à devancer les partis bourgeois sur ce terrain, comme lorsque le président du groupe socialiste au Parlement propose à Feldmann le matin du 4 novembre que le Conseil fédéral prenne position contre l’URSS : Sidler, Roger et Moser, Peter (éds.), Markus Feldmann Tagebuch 1923-1958, Bâle, Schweizerische Gesellschaft für Geschichte, Kommissionsverlag Krebs, 2001, t. 5, p. 189.
[23] Le cas le plus grave est sans doute la véritable chasse contre le philosophe Konrad Farner dont l’adresse privée avait été communiquée dans la NZZ. Lanz, Rita, « Solidarität und Ausgrenzung : die Ungarnhilfe in der Schweiz 1956 », Schweizer Monatshefte 86 (2006), pp. 35-36.
[24] König, Mario, « Rasanter Stillstand und zähe Bewegung Schweizerische Innenpolitik im Kalten Krieg – und darüber hinaus », in : Leimguber, Walter (éd.), « Goldene Jahre » : zur Geschichte der Schweiz seit 1945, Zurich, Chronos, 1999, pp. 151-172.
[25] Appeal to Governments, 6.11.1956, United Nations Archives Geneva, Genève : G.I 30/2 20533 Jacket 1.
[26] « La pratique suisse de l’asile à l’époque récente. Rapport du DFJP du 7 mars 1957 », in : Ludwig, Carl, La politique pratiquée par la Suisse à l’égard des réfugiés de 1933 à nos jours, Berne, 1957, p. 395.
[27] Ibid., p. 394.
[28] Lanz, « Solidarität und Ausgrenzung », art. cit., p. 34 ; Duvanel et Levy, Politique en rase-mottes, op. cit., p. 82.
[29] « Tâches exceptionnelles », Feuille d’avis de Lausanne, 29 novembre 1956.
[30] « Pour les réfugiés de Hongrie », Feuille d’avis de Neuchâtel, 29 novembre 1956 ; « Die Sammelstelle des Roten Kreuzes in Zürich », Neue Zürcher Zeitung, 13 novembre 1956.
[31] Hier hat die Schweiz die Möglichkeit, zu zeigen, dass die Grundwelle der Sympathie und des ehrfürchtigen Respekts vor dem Heldentums dieses Volkes, die in unserem Land […] alle Herzen mitgerissen hat, den Manifestationen in Sälen und auf Plätzen die praktische Taten folgen lassen wird : « Hilfeleistung für die Flüchtlinge aus Ungarn », Neue Zürcher Zeitung, 14 novembre 1956.
[32] « Les Neuchâtelois et l’aide à la Hongrie », Feuille d’avis de Neuchâtel, 9 novembre 1956.
[33] « Montreux. De nouveaux réfugiés », Feuille d’avis de Lausanne, 17 novembre 1956.
[34] « L’arrivée des Hongrois à Neuchâtel » », Feuille d’avis de Neuchâtel, 14 novembre 1956.
[35] « Pour les Hongrois », La Liberté, 20 novembre 1956 ; Lanz, « Solidarität und Ausgrenzung », art. cit., p. 34.
[36] Lettre d’un particulier, 22 novembre 1956, Archives d’Etat du Valais (AEV) : 3510-1984/33, 9.1.3.
[37] Lettre d’un particulier, 17 novembre 1956, id.
[38] « Chronique de la Tour-de-Peilz », Feuille d’avis de Lausanne, 17 novembre 1956.
[39] « Dombresson. Aide aux réfugiés hongrois », Feuille d’avis de Neuchâtel, 9 novembre 1956.
[40] (ndlr. les noms sont des pseudonymes. Les portraits des personnes sont présentés dans Robert, Des migrant·e·s et des revenant·e·s. op. cit., pp. 409-417) Entretien avec Mária Szőregi, Vernier, 10 juin 2015.
[41] Entretien avec Péter Gémes, Bâle, 1er avril 2015.
[42] Camille Sauge, « Recettes suisses pour réfugiés hongrois », Feuille d’avis de Lausanne, 10 décembre 1956.
[43] Pauline Cancela, « En 1956, on se décarcasse pour les Hongrois », Le Courrier, mardi 6 août 2013.
[44] Rapport final concernant l’aide fournie par les services du Département militaire du 29 novembre 1956 au 18 février 1957, p. 15, Archives fédérales suisses (désormais CH-BAR)#E4001D#1973/125#1434*.
[45] Ibid., p. 13.
[46] Aide aux réfugiés hongrois. Rapport final concernant l’aide fournie par les services du Département militaire du 29 novembre 1956 au 18 février 1957, CH-BAR#E4001D#1973/125#1434*.
[47] Robert, Des migrant·e·s et des revenant·e·s, op. cit. La question des rapatriements est au centre de notre recherche doctorale. Les chiffres retenus ici sont issus de: Stand der Kartothek für ungarische Flüchtlinge des Aufstandes 1956 per 30. Juni 1962, Archiv für Zeitgeschichte der ETH Zurich, SFH (Schweizerische Flüchtlingshilfe/Organisation suisse d’aide aux réfugiés)-Archiv, Zurich : 31 a (A).
[48] Robert, Des migrant·e·s et des revenant·e·s, op. cit., pp. 155-224.
[49] En témoigne les inquiétudes des fonctionnaires du Département fédéral de justice et police (DFJP) qui prennent l’exemple de réfugié∙e∙s à Hambourg en grève de la faim ou à Londres principalement en raison de l’absence de possibilités d’émigrer outre-mer. Procès-verbal de la conférence des directeurs cantonaux de police concernant l’accueil éventuel de nouveaux réfugiés hongrois en Suisse, 15 mars 1957, p. 13, CH-BAR#E4001D#1973/125#1434*.
[50] Lettre d’un particulier, 25 novembre 1956, AEV : 3510-1984/33, 9.1.3.
[51] Lettre d’un particulier, 29 novembre 1956, Id.
[52] « L’arrivée émouvante de 72 réfugiés hongrois hier soir à Neuchâtel », Feuille d’avis de Neuchâtel, 14 novembre 1956 ; « Ils n’ont plus rien, mais l’enfer est derrière eux », L’Illustré, 22 novembre 1956.
[53] Michelet, Magali, « Sen a skutečnost » : Rêve et réalité. Une histoire orale de l’exil tchécoslovaque en Suisse après 1968 [Mémoire de master en histoire contemporaine], Fribourg, 2018, pp. 107-108, publié sous le titre Rêve et Réalité d’un exil. Parcours de tchécoslovaques en Suisse (1968-2018), Fribourg, Aux sources du Temps présent, 2018.
[54] Brežná, Irena, L’ingrate venue d’ailleurs, Lausanne, Éditions d’en Bas, 2014, p. 6.
[55] Lanz, Flüchtlingshilfe zwischen Vergangenheitsbewältigung und Selbstdarstellung, op. cit., pp. 108-109.
[56]« Au centre d’accueil de la Croix-Rouge », Feuille d’avis de Lausanne, 23 février 1957.
[57] Casoar, Phil et Balázs, Eszter, Les héros de Budapest, Paris, Éditions Les Arènes, 2006, p. 182.
[59] Mahnig, Hans (éd.), Histoire de la politique de migration, d’asile et d’intégration en Suisse depuis 1948, Zurich, Seismo, 2005, p. 264.
[60] Du nom du politicien zurichois James Schwarzenbach, principal initiateur de votations populaires visant à réduire le nombre d’étranger·e·s en Suisse.
[61] Morin, « Pour une crisologie », art. cit., p. 163.